En route vers 2050 : la Basse-Casamance élabore sa vision pour une région agroécologique d’exception

Du 18 au 22 mars 2024, les membres de la dynamique de recherche-action PRATAM ont organisé un atelier d’idéotypage à Cap Skirring, au Sénégal. A la clé, la co-construction d’une vision partagée pour une région de Basse-Casamance agroécologique et résiliente à l’horizon 2050.

Un patrimoine agroécologique menacé

Forêts nourricières, mangroves et riches plaines rizicoles… La Basse-Casamance est une région du sud du Sénégal qui présente un riche patrimoine agroécologique, héritage d’une société agraire ancienne ancrée dans un écosystème de delta. Les habitants de Basse Casamance ont su créer et conserver un mode de vie résilient, fondé sur une combinaison complexe d’activités productives (riziculture, cueillette, pêche, etc..), récréatives et spirituelles. Toutefois, le dérèglement climatique et la résurgence de nouvelles menaces anthropiques ont commencé à fragiliser ces équilibres. La région est impactée par de multiples pressions – déforestation, essor de plantations spéculatives, salinisation des bolongs et des rizière, exode rural, etc. – sous-tendues par une crise profonde des valeurs et institutions coutumières.

La dynamique de recherche-action PRATAM

Face à ce constat, des acteurs académiques et non-académiques* ont décidé de se réunir en 2024 au sein de la dynamique de recherche-action PRATAM. Le PRATAM – Potentiels de Résilience et d’Autodétermination des Territoires Agroécologiques Menacés – a pour finalité d’accompagner les acteurs de la Basse-Casamance vers une transition agroécologique basée sur la conservation et la valorisation du patrimoine matériel (en particulier naturel) et immatériel. Les chercheurs engagés dans cette dynamique se sont donnés pour objectifs de produire des connaissances activables sur le fonctionnement du territoire agroécologique de Basse-Casamance, ses dynamiques de changement et ses mécanismes de résilience. En collaboration avec les acteurs locaux, ils comptent contribuer à une reconnaissance de la valeur universelle exceptionnelle du territoire, et à une (ré)activation des formes de résistance coutumière.

Travaux de groupe de construction des arbres à problèmes et solutions lors de l’atelier d’idéotypage. Raphael Belmin / CIRAD

Idéotypage : vers une vision d’avenir pour la Basse-Casamance

Du 18 au 22 mars 2025, à Cap Skirring, les membres de la dynamique PRATAM ont co-organisé un atelier avec pour objectif de co-concevoir un idéotype de territoire agroécologique résilient et innovant. L’idéotypage est une méthode collaborative de ‘visioning’ développée par le CIRAD qui permet d’imaginer avec précision le futur désiré pour un territoire afin répondre à ses enjeux de durabilité. Les participants étaient issus de secteurs d’activités divers – recherche, collectivités, services étatiques, royaumes, organisations paysannes, GIE féminins, associations de jeunesse, aires marines protégées, opérateurs touristiques, etc. – permettant d’exprimer la diversité des activités en présences dans le territoire : riziculture, pêche, cueillette, vin de palme, transformation agroalimentaire, gestion des forêts et de la mangrove, filières maraichères et fruitières et de produits forestiers non-ligneux, culture, tourisme, artisanat, entreprenariat rural.

A travers une série d’exercices étalés sur 5 jours, ces acteurs ont élaboré leur vision commune du territoire désiré à l’horizon 2050. Ce faisant, ils ont mis l’accent sur la gestion durable des écosystèmes forestiers et halieutiques, sur la relance de la production agricole et la sécurisation des ressources productives (terres, travail, etc.), sur la valorisation symbolique et économique du terroir au travers des produits et du tourisme, et enfin, sur la nécessité d’un nouveau contrat social en réponse à la crise des valeurs socio-culturelles que connait la région. Pour Tidiane Sané, professeur de géographie à l’Université Assane Seck de Ziguinchor (UASZ) et co-organisateur de l’atelier PRATAM, la démarche d’idéotypage a permis de « faire un diagnostic profond et se projeter dans l’avenir, pour voir quels sont les leviers à activer pour que la Casamance puisse accéder au développement tant souhaité par le citoyen sénégalais et se projeter dans le futur d’ici 2050 ».

Les participants dévoilent leurs idéotypes lors du dernier jour d’atelier. Raphael Belmin / CIRAD

Engagements des acteurs pour un « territoire agroécologique »

Les résultats de l’atelier PRATAM mettent ainsi l’accent sur le patrimoine agroécologique – matériel et immatériel – de la région Basse-Casamance, vu comme ressource pour construire une trajectoire viable de développement régional équilibré et durable.

Lors de la cérémonie de clôture de l’atelier, les acteurs en présence ont affirmé leur engagement à s’appuyer sur les résultats de l’idéotypage pour renforcer la gouvernance territoriale. Clément Sambou, représentant de la Dynamique pour un Transition Agroécologique Locale (DyTAEL) de Bignona, a salué « les liens consolidés entre les participants, ainsi que la richesse des échanges autour des activités agro-sylvo-pastorales et halieutiques ». Il a également appelé à « un engagement concret pour la création d’une nouvelle DyTAEL à Oussouye ».

Léonard Djibalène, représentant du Royaume de Kalobone, a appelé à « séquencer les actions selon différents horizons temporels (court, moyen, long terme) car le temps nous est compté, face aux urgences sociales et environnementales ». Maurice Diedhiou, président du Conseil Départemental d’Oussouye, a mis en perspective les résultats de l’atelier avec l’agenda Sénégal 2050 : « Pour arriver à un pays souverain et prospère les territoires doivent être consolidés dans ce qui les particularise ».

Photo : Cérémonie de lancement de l’atelier officialisée par Maurice Diedhiou, président du Conseil Départemental d’Oussouye. Raphael Belmin / CIRAD

Contact : Raphael Belmin (CIRAD-ISRA BAME) / raphael.belmin@cirad.fr

*La dynamique de recherche-action PRATAM rassemble depuis 2024 des partenaires de recherche, avec le Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD), l’Université Assane Seck de Ziguinchor (UASZ), l’Institut National de Recherches pour l’Agriculture, l’alimentation et l’Environnement (INRAE), le Bureau d’Analyses MacroEconomiques (BAME) de l’Institut Sénégalais de Recherche Agricole (ISRA), l’Université de Berne et le Centre CREATES. Ces partenaires sont soutenus par plusieurs projets : Safoods, PRATA, ARTS, ACROPICS, ASA FSRP et Liechtenstein Development Service. En 2025, à l’occasion de l’atelier d’idéotypage, la dynamique PRATAM a été enrichie par l’intégration d’acteurs de développement et de la société civile locale à l’instar de l’ONG ETDS, de l’ASAPID, du CEDAF Oussouye, du Royaume d’Oussouye et de la DyTAEL de Bignona. A l’issue de l’atelier d’idéotypage, la dynamique tend à s’élargir à nouveau avec l’intégration de nouveaux acteurs, à l’instar des services étatiques et des collectivités territoriales.

Source : https://www.bameinfopol.info/en-route-vers-2050-la-basse-casamance-elabore-sa-vision-pour-une-region.html

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